IN TISSU n °1 Aubusson-Felletin

Création sur et avec les territoires -In tissu n°1 2023-2024 -Pièce pour 7 interprétes vocaux, une musicienne et une artiste textile

2022 - 2026

performance musicale
Performance In Tissu à La maison Goubely le 16 septembre 2023 ; avec la Cité internationale de la tapisserie et la Scène Nationale d’Aubusson
distribution
Interprétation vocale Frédéric Blin, Stella Cohen Hadria, Jean-Francois Favreau, Maloue Fourdrinier, Bertille Leplat, Camille Reverdieau, Alexandra Terracher écriture, composition, direction Stella Cohen Hadria composition, interprétation Gwennaëlle Roulleau dramaturgie des dispositifs Nadège Sellier arts textiles Delphine Cialvaldini Prise de notes subjective Laurie-Anne Estaque Direction technique Fred Marcon

« Dans la cosmogonie Dogons /
le métier à tisser serait la bouche
les dents le peigne
la langue la navette /
Cette parole qui sort de la bouche est comparée au fil » 

Clara Salomon, lissière, Entretiens en juin 2022 sur les liens entre parole et tissage dans les ateliers du BMA à la Cité internationale de la tapisserie – Aubusson
Note d’intention

D’une enquête locale, à une prise de conscience intime vers une ouverture universelle, je veux que cette création place le spectateur dans un temps suspendu. Une parenthèse dans laquelle chacun pourrait entrevoir un moment où il a pris le temps d’écouter. Et ainsi de sentir le précieux « fragile » afin de l’intégrer au tissage de sa vie unique et de son unique vie.
Dans un premier temps, cette performance parle des lissières. Un an avant le démarrage du projet F.I.L, en 2019, j’ai rencontré une lissière qui m’a parlé de son rapport au temps. C’était le confinement et elle me disait – je paraphrase : « moi le confinement ça ne me change pas grand-chose, je tisse une tapisserie à la main durant 6 ,8, 10 mois... je continue... ». Les lissières prennent le temps indispensable à la création d’un objet d’art monumental : une tapisserie. Et c’est leur attention à chaque détail, au moindre gestes, au « presque invisible » qui leur permet de confectionner cet ouvrage.
Cette performance veut, à travers leurs mots et leurs entours, leurs voix, le sons de leur geste, les ambiances des ateliers et la musique, dévoiler leur processus de création.
Au fil du temps, je me suis aperçue que leur approche de la tapisserie n’était pas seulement une approche technique mais qu’elle allait
bien au-delà. Leur approche du travail résonnait dans leurs vies et s’est mise à résonner pour moi aussi.
Plus je dialoguais sur le rapport aux diverses temporalités, plus on me parlait de tissage. Et plus on me parlait de tissage, plus je me rendais compte que composer une musique, écrire un texte, dire une parole et peut-être même vivre une vie était un tissage. Le tissu s’inscrit dans tellement de moments de la vie. Nous sommes entourés de tissu, nos linges et nos vêtements, de la naissance à la mort.
Les paroles des lissières sur le tissage des temps faisaient écho à la fragilité de la vie, à la fragilité de mon propre corps (fait lui-même de tissus organiques) à celle du corps des autres vécue par procuration en côtoyant la maladie de proches ; à la fragilité du vivant dans des moments de pertes de repères, de deuils, d’accidents ; mais aussi à la douceur dans le soin parfois apportée aux tissus abîmés.
Je proposerai, à travers cette performance, de séjourner à ces endroits de vie sur lesquels on n’a pas l’habitude de s’attarder. Même si on sait sans le savoir vraiment qu’ils nous touchent de manière plus ou moins intense. Au tempo des récits des lissières, cette création parlera de choses dont on ne parle pas.
Février 2023, Stella Cohen H.